Votre entreprise vient de dépasser les seuils légaux à partir desquels la désignation d’un Commissaire aux Comptes (CAC) ou d’un second CAC est obligatoire ?
Afin de tout savoir sur la désignation du CAC, les conséquences pour votre société (et pour vous) en cas d’oubli, nous vous invitons à parcourir notre article dédié.
Dirigeants de sociétés bien établies ou de start-ups, nommer un commissaire aux comptes (CAC) devient obligatoire si votre entreprise commence à atteindre une certaine taille.
Dans une SAS, par exemple, la nomination d’au moins un commissaire aux comptes est requise dès lors que deux des trois seuils fixés par décret sont dépassés à la clôture de l’exercice.
Ces seuils ont été modifiés par la loi PACTE du 22 mai 2019 :
- Total du bilan : 4 millions d’euros ;
- Chiffre d’affaires : 8 millions d’euros ;
- Nombre moyen de salariés au cours de l’exercice : 50.
Lorsque votre société croît au point de se trouver soumise à l’obligation d’établir et déposer des comptes annuels consolidés en vertu de l’article L.233-16 du Code de commerce, cette obligation de désignation se trouve encore renforcée. En effet, l’article L.823-2 du Code de commerce impose la désignation d’un second CAC.
L’absence de nomination ou la nomination tardive du CAC peuvent être lourdes de conséquences pour la société (nullité des délibérations) et pour vous en tant que dirigeant (responsabilité civile et pénale).
Toutefois, la loi se montre relativement souple dans la mesure où elle permet, sous certaines conditions de régulariser les actes susceptibles de nullité.
Quand dois-je nommer mon CAC ?
Il faut ici distinguer selon que la société désigne un CAC pour la première fois et lorsqu’elle est tenue de procéder à la désignation d’un second CAC.
- Désignation du premier CAC (dépassement d’au moins deux des trois seuils prévus par la loi au cours de l’exercice N)
L’obligation de nommer un premier CAC intervient dès lors que la société franchit deux des trois seuils fixés par la loi PACTE (total bilan > à 4 M€ ; chiffre d’affaires > à 8 M€ et nombre de salariés > à 50).
L’obligation entre en vigueur dès l’exercice N+1 (Bull. CNCC décembre 2005 p. 700).
Il n’est donc pas obligatoire de nommer un CAC pour contrôler les comptes de l’exercice N.
Le CAC doit être désigné par l’assemblée générale au cours de l’année suivante. Il examinera les comptes de l’exercice N+1.
Exemple : A est une SAS spécialisée dans le développement et la vente de logiciels, employant 15 salariés.
Au cours de l’exercice 2020, elle a réalisé un chiffre d’affaires de 7.500.000 euros avec un total de bilan de 5.000.000 euros. Elle n’est pas tenue de désigner un CAC en 2021.
Au cours de son exercice 2021 (N), grâce à un logiciel performant, elle réalise un chiffre d’affaires de 10.500.000 euros, pour un total de bilan de 6.250.000 euros et emploie 20 salariés.
Elle est désormais tenue de désigner un CAC et devra le faire au cours de l’année 2022, avant l’assemblée générale d’approbation des comptes de l’exercice 2022 (N+1).
- Désignation du second CAC (obligation d’établissement et de publication de comptes annuels consolidés)
L’obligation de désigner un second CAC intervient dès lors que la société se trouve tenue d’établir et publier des comptes annuels consolidés, soit qu’elle réunit les conditions suivantes :
- Elle contrôle de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs entreprises au sens de l’article L.233-16 du Code de commerce ;
- Elle ne satisfait plus aux conditions d’exemption posées à l’article L.233-17 du Code de commerce :
- Elle n’entre pas dans le périmètre de consolidation d’une société déjà soumise à l’obligation d’établir et de publier des comptes annuels consolidés ; ou
- Elle, ainsi que les sociétés qu’elle contrôle, dépassent ensemble deux des trois seuils prévus à l’article R.233-16 du Code de commerce pendant deux exercices consécutifs : total bilan supérieur à 24M€ – chiffre d’affaires supérieur à 48M€ – nombre de salariés supérieur à 50.
Le second commissaire aux comptes doit être nommé par l’assemblée générale avant la clôture de l’exercice N+1, au titre duquel doivent être établis les premiers comptes consolidés (Notes d’information CNCC 2021 NI.I, 2.12.2 A) et CNCC 2012 XIII, 2.61 à 2.63).
Exemple : Le groupe constitué de la société A et de ses filiales dépasse au cours des exercices 2020 (N-1) et 2021 (N) les seuils prévus aux articles L.232-17 et R.233-16 du Code de commerce.
Elle doit donc établir des comptes annuels consolidés au titre de l’exercice 2022 (N+1).
La société A doit ainsi nommer un second CAC avant le dernier jour de son exercice 2022.
La nullité des délibérations
La nomination tardive correspond à celle ayant eu lieu après la période susvisée.
En vertu de l’article L.820-3-1 du Code de commerce, toutes les décisions prises par l’organe délibérant encourent la nullité, même celles pour lesquelles l’intervention du commissaire aux comptes n’était pas requise (Bull. CNCC n° 97-1995 p. 117).
Pour l’exercice de l’action en nullité, l’appréciation de la régularité de la désignation doit se faire au jour de l’assemblée.
Vos risques en tant que dirigeant
L’irrégularité de la désignation est de nature à engager la responsabilité tant civile que pénale des dirigeants.
Le défaut de désignation régulière d’un commissaire aux comptes par la société peut engager la responsabilité de la société à l’égard de tous ceux qui souffrent d’un préjudice direct.
Il peut également constituer une faute de gestion susceptible d’entraîner, en cas de procédure collective de la société, la condamnation des dirigeants au comblement du passif social.
Enfin, l’article L.820-4 du Code de commerce indique que le fait de ne pas désigner un (premier ou second) CAC alors que la société y était tenue, expose le dirigeant à une peine d’emprisonnement de 2 ans et une amende de 30.000 euros.
En pratique, les condamnations sont rares, mais le risque ne doit pas être exclu.
Vous avez le droit à une seconde chance
L’article L.820-3-1 du Code de commerce précise que la nullité disparaît si ces délibérations sont expressément confirmées par l’organe compétent sur le rapport de commissaires aux comptes régulièrement désignés.
La nomination tardive d’un CAC peut donc être régularisée.
Lorsque la désignation d’un second CAC était requise, la CNCC (Bull. CNCC n°145, mars 2007, EJ 2006-121, p.148 et suivants) indique que celui-ci peut toujours être nommé avant l’assemblée générale approuvant les premiers comptes consolidés (dans notre exemple ci-dessus, l’assemblée générale ordinaire en N+2 approuvant les comptes de l’exercice N+1).
Dans le cas où un CAC devait être nommé en N+1 mais ne l’a pas été, les associés de la société devront prévoir en N+2 (et avant l’assemblée générale d’approbation des comptes) une résolution spéciale en vertu de laquelle le CAC contrôlera les comptes de l’exercice clos en N+1 dans le cadre d’une mission complémentaire.
Il faut rappeler en effet qu’en principe, le CAC ne peut examiner les comptes d’un exercice clos pour lequel il n’était pas nommé. Par conséquent, s’il se prononce sur un tel exercice, ce ne saurait être que sur le fondement d’une mission complémentaire confiée par la société.
Le CAC ne peut refuser cette mission lorsqu’elle se fonde sur l’article L820-3-1 du Code de commerce
Dans tous les cas de figure, en cas de nomination tardive, l’organe compétent devra approuver à nouveau les décisions susceptibles d’être annulées mais cette fois, sur la base d’un rapport de régularisation établi par le CAC désigné.
Le rapport de régularisation devra mentionner l’ensemble des décisions irrégulières, y compris la nomination tardive du deuxième commissaire aux comptes.
Le rapport sera ensuite soumis à l’approbation de l’organe compétent.
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